« Plutôt que d’essayer de provoquer l’immersion en proposant des espaces d’images toujours plus réalistes, les interfaces des médias immersifs doivent s’adresser à l’ensemble du corps en permettant une action kinesthésique. »
Même si les promoteur·rices des nouveaux médias et de l’informatique considèrent les technologies de réalité virtuelle contemporaines, telles que l’Oculus Rift (Oculus VR 2016), comme l’apogée des médias immersifs, les représentations et les illusions reproduisant l’espace en trois dimensions remontent en réalité aux premières formes d’art. En parallèle à la création d’illusions spatiales, il a ainsi existé des tentatives de circuler physiquement ou mentalement dans des environnements conçus, augmentés ou artificiels. Le concept d’immersion ne peut donc pas être uniquement considéré comme un effet des technologies numériques ou des interfaces contemporaines. Il est en effet possible de relier certaines techniques immersives à des médiums artistiques ou à des pratiques plus anciennes et de les replacer dans le contexte général de la perception. D’autres formes d’immersion, notamment informatiques, proviennent d’innovations et de technologies actuelles, et sont donc en cours de formation et de stabilisation en tant que nouveaux programmes culturels. Poser les jalons de la création de ces espaces illusoires peut ainsi permettre de libérer le concept d’immersion des cadres d’étude strictement techniques ou numériques qui sont habituellement mobilisés pour les comprendre. […]
Premières formes d’immersion dans des espaces simulés
Les recherches [de l’historien] Oliver Grau ont démontré que les espaces esthétiques immersifs font l’objet d’expérimentations depuis l’époque prémoderne :
« C’est seulement en apparence que l’idée de réalité virtuelle est sans histoire ; en fait, elle est fermement ancrée dans la tradition de l’histoire de l’art, qui s’inscrit dans un mouvement discontinu de quête d’espaces d’images illusoires11 Oliver Grau, Visual Art. From Illusion to Immersion, Cambridge (MA), MIT Press, 2003, p. 339, http://b-o.fr/grau. »
[…] Dès l’Antiquité, on retrouve des illusions d’espaces composés de peintures et des fresques qui offrent à l’assistance une vision à 360° comme à la Villa dei Misteri de Pompéi (60 avant notre ère)22 Ibid, p. 25. . Sur le même principe, Robert Barker breveta en 1787 une technique immersive (une peinture à la perspective exacte réalisée sur une toile complètement circulaire) sous le nom de «